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28/10/2020 Point de vue

A quoi sert le collège consultatif des parties prenantes de l’ABE ?

Les réglementations bancaires européennes suivent leur chemin au moment où les établissements sont appelés à soutenir l'économie via le crédit. Christophe Nijdam, membre du collège consultatif Banking Stakeholders Group (BSG) de l'Autorité bancaire européenne (ABE), explique le rôle et les projets de cette instance.

Post-crise 2008, l'Union européenne a institué en 2011 trois Autorités de supervision européennes (les « ESAs ») : l'Autorité bancaire européenne (« EBA ») pour les établissements financiers, l'Autorité européenne des marchés financiers (« ESMA ») et l'Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles (« EIOPA »).

Alors que le législateur européen intervient dans la réglementation bancaire au travers des « directives » (dites « de niveau 1 »), l'EBA est chargée d'en définir des « standards techniques règlementaires » (« RTS ») et des « standards techniques de mise en œuvre » (« ITS »), tout comme établir dans certains cas des « recommandations » (« Guidelines ») et normer des « questions/réponses » (« Q&A ») avec les établissements financiers qu'elle règlemente. Les règlementations de l'EBA sont ainsi dites « de niveau 2 et 3 » dans la législation européenne. Elles entrent dans la mission principale de l'EBA qui consiste à faire converger les règlementations bancaires nationales des Etats-membres de l'Union européenne dans un livre de règles unique (« Single Rulebook »).

C'est dans ce cadre d'élaboration règlementaire que l'EBA doit consulter statutairement le collège consultatif (« BSG ») sur toutes ses règlementations, mais le BSG peut aussi s'autosaisir, par exemple s'il considère que certains développements du marché bancaire méritent l'attention des régulateurs. Le BSG s'est ainsi exprimé dès la mi-mars 2020 dans le cadre de l'urgence de la crise sanitaire du Covid-19 sur les réponses à apporter dans l'adaptation temporaire des règles prudentielles.

Le BSG est constitué de 30 membres, représentants des parties prenantes qui sont nommés par le Conseil des Superviseurs (« BOS ») de l'EBA : 13 membres pour le lobby bancaire, 2 représentants pour les salariés du secteur bancaire, 7 pour les associations de consommateurs, 3 pour les utilisateurs de services bancaires, 1 pour les PME et 4 pour le monde universitaire. A l'intérieur de ces catégories de membre est effectué un savant équilibre entre sexes et pays d'origine. Ainsi, il n'y a que deux Français dans le BSG.

La durée du mandat des membres du BSG, précédemment de deux ans et demi, vient d'être portée à quatre ans. Le BSG se réunit au minimum quatre fois par an en assemblée plénière (dont deux en présence du BOS), mais les 5 groupes de travail qui sont constitués en son sein interagissent plus fréquemment sous la forme de conférences téléphoniques. Le premier groupe se concentre sur les sujets de solvabilité, de liquidité et de résolutions bancaires, le deuxième sur la supervision, la gouvernance, les aspects comptables et le reporting, le troisième sur la protection du consommateur, le quatrième sur le digital, la fintech et la regtech, tandis que le dernier groupe de travail planche sur la finance durable.

Les règlementations sur lesquelles le BSG est consulté étant très techniques, le challenge de ses membres non issus du lobby bancaire est de ne pas se laisser intimider par cette technicité et son jargon afin de contrebalancer les efforts du lobby pour déconstruire méthodiquement aux niveaux 2 et 3 ce que le législateur voulait au niveau 1. Le BSG tend à rechercher le consensus des parties prenantes, mais en cas de position minoritaire discordante il se doit de les relater dans ses opinions écrites.

En savoir plus sur l'auteur :
Membre de la SFAF, Christophe Nijdam est membre du collège consultatif (Banking Stakeholders Group, BSG) de l'Autorité bancaire européenne. Ancien banquier, analyste bancaire, dirigeant de l'ONG Finance Watch et responsable de la recherche européenne de Proxinvest (conseil en gouvernance), il a enseigné à Sciences-Po pendant 18 ans et est l'auteur de « Parlons banque en 30 questions » (en coll. avec Jézabel Couppey-Soubeyran, La Documentation Française, 2018 et 2014), « Calculatrix, 85 astuces pour jongler de tête avec les chiffres » (Les Liens qui Libèrent, 2017) et « La finance pour les nuls en 50 notions clés » (First Editions, 2019). Il est également administrateur de l'A.D.A.M., présidée par Colette Neuville, et de la « Finance pour tous », présidée par Christian Noyer.

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