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28/02/2018 Point de vue

Baromètre 2017 du crowdfunding en France

La dernière édition du baromètre KPMG & FPF du crowdfunding confirme la place du financement participatif dans le paysage global du financement de l'économie, avec +44% de fonds collectés en 2017. Stéphanie Savel, présidente de l'association Financement Participatif France et de Wiseed, s'est livrée au jeu des questions-réponses.

Quel enseignement principal tirez-vous de ce nouveau baromètre ?
Le secteur a encore connu une belle croissance en 2017 et confirme son installation dans le paysage du financement. Avec 261 millions sur les 336 millions récoltés, le secteur économique au sens large y est largement représenté, quel que soit le mode de financement (don, prêt et investissement). Le crowdfunding touche toujours plus de secteurs : outre le poids très fort de l'immobilier, les projets concernent l'environnement et l'énergie, l'industrie, le commerce et les services, les technologies, la santé et même le secteur agricole, qui commence à percer.

On constate une forte croissance des prêts et obligations. Comment l'expliquez-vous ?
La forte croissance des prêts est surtout portée par les obligations, qui passent de 45 à 115 millions d'euros, en particulier dans les secteurs de la promotion immobilière et du financement de projets de production d'énergie renouvelable. Les particuliers ayant investi dans les start-up ont en effet tendance à diversifier leur portefeuille sur des produits moins risqués, montrant en cela leur capacité à réaliser leur propre allocation d'actifs.
Même si, dans un contexte de taux bas, les porteurs de projet savaient qu'ils pouvaient avoir de l'argent moins cher par ailleurs, ils ont compris le double intérêt du crowdfunding : donner une forte visibilité à leur projet et créer des communautés de financeurs et d'investisseurs capables d'assurer le relais de l'information. Par ailleurs, le recours au financement participatif sous forme d'obligations leur permet de réduire l'immobilisation en fonds propres nécessaire au montage des projets dans ces secteurs (entre 10 et 20 %).

Le baromètre montre un recul des investissements en actions et royalties. L'absence de marché secondaire peut-il expliquer cette évolution ?
Une partie du recul du crowdequity provient de la volonté des particuliers de diversifier leurs portefeuilles sur des produits à plus court terme, donc plus liquides et moins risqués.
Le marché est encore trop jeune pour que les plates-formes puissent envisager un marché secondaire. Une autre difficulté tient au fait que les fonds d'investissement qui prennent le relais ne veulent pas racheter les parts des particuliers. Il faut penser autrement la liquidité sur la partie equity pour arriver à faire davantage tourner les portefeuilles des particuliers. FPF a suggéré que le Gouvernement alloue une partie du fonds d'investissement à l'innovation au rachat des parts investies par les particuliers dans les start-up via ses plates-formes. L'Etat serait aussi gagnant car les particuliers ayant revendu leur part avec une plus-value seront soumis à une imposition. Une fois actionnaire, il pourrait envisager le mécanisme de sa propre sortie à un stade de capital-développement.

Le financement participatif est-il davantage pris au sérieux par les pouvoirs publics ?
Les pouvoirs publics sont assez à l'écoute de la profession. FPF rencontre régulièrement les cabinets ministériels et a été associé aux réflexions concernant le plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (Pacte). Notre objectif est de faciliter le développement du crowdfunding, outil de fléchage parfait pour orienter le financement des particuliers vers l'économie réelle.
Nous attendons désormais des mesures permettant d'orienter une petite partie de l'assurance-vie sur des projets financés par les plates-formes ainsi qu'un allègement des contraintes qui pèsent sur nous car nous sentons actuellement une tentation de nous soumettre à la réglementation applicable in extenso au monde bancaire et financier, notamment en termes d'information des investisseurs. Nous sommes conscients de notre responsabilité. Chez FPF, nous y travaillons beaucoup : formations pointues pour les plates-formes, diffusion de règles et de bonnes pratiques, veille sur l'application de ces règles…

Propos recueillis par Anne Bechet
Contact : revue@sfaf.com

Financement Participatif France (FPF) est l'association professionnelle des acteurs du crowdfunding en France, avec 150 membres dont 70 plateformes de crowdfunding.