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13/06/2019 Point de vue

Investisseurs : comment gérer le changement climatique

La société Mercer, qui a développé dès 2009 une recherche et des services de conseil en investissement autour de la question du risque systémique posé par le changement climatique, a récemment publié l'étude Investing in a Time of Climate Change – The Sequel (« La suite »). Analysefinanciere.org a interrogé Frédéric Debaere, leader investissements chez Mercer France, qui reprend ici les principaux constats de l'étude.

 

Début avril 2019, vous avez publié le rapport  Investing in a Time of Climate Change - the Sequel (« La suite »). Sur cette décennie, quelles évolutions avez-vous constatées concernant le comportement des investisseurs vis-à-vis du risque climatique ?
Sur la décennie, un groupe d'investisseurs, que nous appelons « Future Makers », s'est distingué en intégrant les risques climatiques au cœur de leur stratégie d'investissement. Il s'agit de grandes institutions, de type fonds de pension ou fondations, qui ont une responsabilité fiduciaire et sont, par ailleurs, exposés aux pressions extérieures.
Les grands assureurs ont suivi mais il reste une majorité d'investisseurs, que nous appelons « Future Takers », qui, par manque de moyens ou de convictions, se contentent de suivre le mouvement et s'en remettent à l'industrie de la gestion d'actifs. Il est vrai que de ce côté, l'offre s'est globalement étoffée, même s'il convient d'être sélectif : intégration du risque climatique dans l'analyse financière, utilisation du pouvoir actionnarial pour influencer les pratiques au sein des entreprises, construction d'indices bas-carbone, produits d'investissement dans des entreprises ou des projets s'intégrant dans la transition vers une économie bas-carbone.

Le rapport « Investing in a Time of Climate Change - the Sequel » propose 3 scénarios de changement climatique à horizon de temps différent (2030-2050-2100). Comment ont-ils été bâtis ? Quels en sont les fondements ?
Mercer s'est appuyée sur Cambridge Econometrics et leur modèle E3ME qui permet d'analyser les politiques économiques énergie-climat. Il a été développé, à l'origine, dans le cadre des programmes de recherche lancés par la Commission européenne il y a vingt ans, avec les mises à jour et différentes avancées apportées depuis. E3ME est un modèle macroéconomique relié à un modèle climatique appelé GENIE, modèle d'évaluation intégrée.
Pour arriver à mesurer l'effet des scénarios climatiques sur la performance financière, nous croisons, pour chaque scénario climatique, les trajectoires quantifiées propres aux différents facteurs de risque et les sensibilités à ces facteurs affectées à chaque classe d'actifs et secteur d'activité.

Quelles sont vos principales conclusions sur les liens entre les changements du climat et les performances financières ?
Dès lors qu'une transition vers une économie bas-carbone, aussi rapide que possible, est un objectif commun, tous les investisseurs sont concernés. Leur implication est doublement sollicitée : pour un portefeuille diversifié, un scénario limité à 2 °C est globalement meilleur qu'un scénario 3 °C ou 4 °C du point de vue de la performance financière attendue. C'est un premier résultat de l'étude qui a pu être quantifié sur le long-terme et testé en cristallisant les effets sur le court terme. Dans un scénario limité à 2 °C, l'étude a par ailleurs permis de quantifier dans quelle mesure certains secteurs d'activité et certaines classes d'actifs offrent des perspectives supérieures.
Les investisseurs peuvent mieux gérer ces risques et réorienter une partie de leur portefeuille vers les projets d'avenir.

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